90 ans, le fait n’est pas banal

Une société de gilles est avant tout un groupe d’amis et connaissances qui ont choisi de fêter le carnaval ensemble.

On se groupe autour du même objectif : faire le gille le Mardi Gras chaque année. Durant l’année la société reste en léthargie relative en préparant le carnaval suivant… Dans nos statuts, il est clairement écrit que « la Société a pour seul objectif d’organiser une société de gilles en vue de sortir le Mardi-Gras ».

Notre carnaval traditionnel représente quelque chose de particulier, de profond, de rituel, … qui sera renouvelé chaque année avec passion et amour de la tradition. Le Mardi-Gras n’est pas seulement un événement festif à Binche. Au-delà de la réjouissance, il y a une célébration à partager. Comment mieux la partager qu’entre amis qui sont de connivence ?

Mais au fil des années, les gilles vont changer, se succéder; les amis ne sont plus les mêmes, des groupes se disloquent, d’autres se créent. De la même manière, des sociétés nombreuses furent créées et ont disparu au cours des décennies.

Mardi Gras 1929 © Archives de la Société.

Ce qui a permis à une société comme la nôtre de subsister, à l’instar des autres sociétés anciennes, c’est l’esprit qui s’est installé au sein du groupe et qui a dépassé les individus pour devenir celui du groupe…Tout nouvel adhérent s’engage donc à entrer dans la corporation et à adopter, à respecter et transmettre les valeurs et l’esprit qui l’animent.

Cela n’est pas si simple lorsque les choses évoluent.

Un fait notoire est la manière dont les sociétés s’organisent.

Au début du 20e siècle et pratiquement jusqu’à la deuxième guerre mondiale, nombreuses étaient les sociétés qui portaient le nom d’un café ou de son tenancier. En effet, c’était souvent ce dernier qui organisait la «soumonza» en vue de permettre la sortie du Mardi-Gras. C’est donc sous la dépendance d’un tenancier d’établissement que les groupes de gilles se formaient. Il suffisait d’un changement de rapport ente les partenaires pour que la société périclite et soit dissoute. Une nouvelle se formait ailleurs…
Aujourd’hui, il n’en est plus de même. Le pouvoir du cafetier a disparu ; il se contente de tenir le local pour la société qu’il accueille.
D’autre part, la société s’est organisée progressivement autour d’un comité ayant établi des règles précises de fonctionnement, promulguant des statuts pour en garantir les valeurs et sa pérennité.
Enfin, on peut aussi signaler, pour expliquer la solidité des groupes, la multiplication des activités en dehors des seules sorties carnavalesques. Elles aident évidemment à renforcer les liens entre les membres.

Gageons que, de la sorte, nos sociétés carnavalesques conserveront mieux et plus longtemps leurs principes fondateurs et le respect des valeurs traditionnelles sur lesquelles elles s’appuient.

Il faut seulement veiller à ne pas se laisser entraîner dans des dérives néfastes ou vouloir un immobilisme impossible.